Lorsque nous nous apprêtons à devenir parent, un nouveau chapitre de notre histoire personnelle s’ouvre pour laisser place à du nouveau, de l’inconnu, des premières fois. Cette nouvelle page n’est pas blanche car elle est déjà imprégnée de tout ce qui s’est accumulé au cours de notre vie et qui fait partie de nous, dans toute notre singularité : notre éducation, notre contexte familial, social, nos croyances, nos expériences, nos relations… A tous ces ingrédients va s’ajouter la projection que nous nous faisons de ce bébé qui va advenir et bientôt naître…Comment l’imaginons-nous ? Comment le rêvons-nous ?
L’enfant rêvé
Tout parent désire que son enfant soit bien préparé pour l’avenir et qu’il soit heureux. Ce rêve légitime prend forme avant même que le bébé naisse. Durant la grossesse chacun des futurs parents va imaginer son futur enfant avec son propre prisme : l’enfant sera beau, intelligent, sociable, agréable, il apprendra facilement, sera aimé, ressemblera à…
Cette image idyllique ressemble souvent à l’enfant qu’on aurait voulu être. Inconsciemment, nous lui attribuons la mission de réaliser nos rêves , nos désirs, mais aussi de combler nos manques et c’est tout naturellement que nous allons mettre en place pour l’enfant à naître, ce qui nous a manqué, et tenter de réparer ainsi, inconsciemment nos propres blessures.
Par ailleurs, le parent peut aussi, par projection de lui-même et prolongement narcissique, désirer que son enfant lui ressemble et qu’il possède les mêmes qualités physiques, intellectuelles, sociables que lui, projetant ainsi une vraie complicité, donc des attentes.
Tous ces rêves projetés sur le futur bébé prennent la forme d’un enfant « Rêvé ». Cependant, tandis que le parent évoque ces images idéales de l’enfant à venir, il ressent tout autant de craintes vis-à-vis de son nouveau rôle et de ses futures fonctions et responsabilités.
L’enfant réel
Chaque enfant est donc attendu avec un mélange de rêves et de craintes. Or, celui ou celle qui vient au monde, c’est un enfant réel, avec son univers propre, son rythme de développement, ses caractéristiques et sa vulnérabilité. Au fur et à mesure qu’il va se développer, chaque parent risque d’être déçu par cet enfant qui ne correspond pas nécessairement à ses attentes élevées et l’enfant, de son côté, peut alors très tôt ressentir un stress ou de la culpabilité.
L’enjeu des parents
L’idéal serait de prendre conscience de ce système de pensées et de projections que nous avons tous, avant de devenir père ou mère et peut être de se faire aider si nos blessures d’enfance ont été trop profondes et douloureuses afin de nettoyer le terrain et de « décharger » notre bébé de ce qui ne lui appartient pas
Quel enfant avons-nous été ? Allons-nous reproduire ce que nous avons reçu ou au contraire faire différemment pour éviter les carences dont nous avons souffert ? Quelles sont-elles ? Réciproquement, qu’en a-t-il été pour mon conjoint ? Nos conceptions éducatives seront-elles compatibles ou sources de conflit ? Y réfléchir ensemble à l’avance peut être un beau cadeau à se faire pour soi-même, pour la qualité de notre relation de couple et pour notre enfant.
Le parent sensible et respectueux du caractère unique de son enfant devra donc prendre du recul, réfléchir à son passé et faire le deuil de l’enfant rêvé pour laisser vivre l’enfant réel.
Les attentes sont bénéfiques uniquement si elles sont réalistes c’est-à-dire adaptées au rythme et au niveau de développement de l’enfant. Car si tel n’est pas le cas, c’est-à-dire si les ambitions du parent sont trop élevées, l’enfant risque fort de vivre des échecs et du stress de performance pour essayer d’être conforme et aimé, qui réduiront son estime de soi, surtout si le parent, en raison de ses déceptions, porte son attention sur les aspects négatifs ou sur les défauts de son enfant réel.
Pour que l’enfant soit aimé pour lui-même c’est-à-dire pour qui il est vraiment, prenons le temps de réfléchir avant sa venue, et à l’idéal, avant sa conception, à l’enfant que nous avons été, parlons-en aussi en couple avec notre conjoint, à un professionnel si besoin, de façon à le libérer de nos propres blessures, de nos attentes et de nos projections qui ne lui appartiennent pas et risquent fort de l’empêcher d’être lui-même.
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